Nous retrouvons la réalisatrice Marion Boé en plein cœur de sa tournée régionale du Mois du Doc pour en apprendre plus sur son parcours professionnel et surtout pour l’interroger au sujet de son dernier film, Un Pays de papier
Ja Panvert : “Quelle a été ta carrière cinématographique avant ce film ?”
Marion Boé : “Originaire de Quimper, je me suis déplacée vers le nord où j’ai suivi un Master audiovisuel et multimédia à Valenciennes. Après j’ai fait 10 ans à Paris en tant qu’assistante-monteuse et monteuse sur des documentaires mais également sur des films institutionnels. En 2008, j’étais encore à Paris, j’ai réalisé un premier film documentaire sur le quartier de mes grands-parents à Quimper. Produit par France 3 Bretagne, “La cité des abeilles” raconte leur histoire et celle de la construction de leur quartier avec 100 familles qui ont collaboré pour l’ériger. Ensuite je suis revenu en Bretagne en 2015, à Rennes où je continue encore aujourd’hui à faire du montage. J’ai réalisé un portrait à Mellionnec en 2018 et depuis je fais le montage des portraits tous les ans. Puis j’ai commencé à écrire et tourner ce film, “Un pays de papier” à partir de 2020 et on l’a fini en 2024. Pour moi les documentaires sont des films qui permettent d’aborder des sujets politiques pour mettre en lumière des questions sociales et de solidarité. Donc je compte bien continuer à faire des films. J’ai des idées mais qui ne sont pas encore assez avancées pour être des films. ”
J.P : “Comment es-tu venue à ce sujet ?”
M.B : “Au début, c’est un ami éducateur à Quimper qui m’a parlé des mineurs non-accompagnés. Il m’a fait découvrir ce dispositif qui permet aux mineurs, quelque soit leur nationalité, d’être protégés par l’aide sociale à l’enfance. J’ai trouvé ça super, je me disais “chouette ils sont accueillis”, c’était très naïf de ma part. En m’intéressant au sujet j’ai découvert plus de choses comme le fait qu’ils étaient parfois mis dans des hôtels et qu’on s’occupait pas trop d’eux. J’ai discuté avec d’autres personnes à Rennes et là-bas, une éducatrice m’a parlé d’une avocate, Mélanie, qui s’occupait de ces cas là. Je suis allé la rencontrer et suite à cet entretien j’ai trouvé que c’était un super personnage de cinéma pour partager le parcours de ces jeunes tout en faisant un portrait.
J.P : “Comment t’es-tu sentie pendant le tournage ?”
J’ai fais attention que les jeunes soient à l’aise malgré tout, c’était important pour moi. Je leur demandais vraiment tout le temps s’ils étaient d’accord pour que j’enregistre. Comme je savais que c’était un moment important dans leur parcours pour la reconnaissance de leur minorité, je voulais pas trop interférer donc j’ai choisi un dispositif assez discret.
J’étais seule dans le bureau pour pas que ce soit trop impressionnant.”
J.P : “Ce film dénonce un problème au sein de la justice française, qu’en penses-tu personnellement ?”
M.B : “Clairement oui, on se rend compte que la justice, comme le dit Mélanie, est subjective. Ça dépend des personnes, des juges, qu’on a en face de soi. Même si à la base on croit en la justice, il faut l’admettre et être réaliste, elle n’est pas toujours très juste. Il y a beaucoup de choses à dénoncer. Que ce soit la justice ou la protection de l’enfance c’est des problèmes de moyens financiers également, ces personnes-là n’ont pas forcément les moyens de faire correctement leur travail. Que ce soit les éducateur·rices mais également les magistrat·es qui traitent des dossiers en 18 mois, laissant des gens et des enfants dans la rue pendant ce temps-là.”
Marion poursuit sa tournée régionale et sera à Uzel le 23, à Pleine Fougères le 24, à Rétiers le 25 et à Dinan le 29. Denis Lepaven, monteur du film accompagnera quant à lui la séance du 26 au cinéma de Quintin.