Nous avions découvert le travail de Guillermo Quintero lors d’une projection nomade de son premier film à l’Arboretum d’Huelgoat. Nous sommes ravis de l’accompagner cette année le long du fleuve rouge colombien pour prolonger l’exploration de cette région du monde en pleine transformation.
Maxime Moriceau : Rio Rojo est ton second film en Amazonie colombienne. Le premier, Homo Botanicus, se déroulait-il dans la même région ?
Guillermo Quintero : Oui, je faisais le portrait d’un botaniste et de son apprenti que je filmais comme un maître et son élève. C’était le portrait d’une relation et d’un amour partagé pour les plantes et leur classification. J’ai tourné dans deux régions de l’Amazonie colombienne ce dont on ne s’en rend pas compte dans le film, car ce qui est important, c’est l’idée de la forêt, du voyage, de l’expédition. Rio Rojo a été tourné dans un secteur assez proche même si le paysage change. On y voit plus de plaines dédiées à l’élevage mais c’est quand même dans la même zone.
M.M : Qu’est ce qui te fascine dans ces endroits ?
G.Q : D’abord l’aventure, et puis les formes diverses et variées de la nature. J’ai fait cinq ans de biologie et, comme les botanistes de mon premier film, je suis passionné par toute cette diversité qu’on trouve en Colombie. C’est un pays très riche en terme de paysages et d’écosystèmes. Cette nature me fascine à la fois de façon rationnelle par le vivant et les espèces mais il y a aussi un côté irrationnel qui se rapproche du sublime. C’est plus une sensation qu’on ressent dans l’estomac quand on est face à cette immense forêt et qu’on pense à tous ces êtres vivants qui l’habitent. Je suis aussi fasciné par les humains qui vivent ou traînent dans ces endroits-là, que ce soit les botanistes ou les ethnies qui se sont installées là et qui ont trouvé une forme d’équilibre avec la forêt.
M.M : Dans Rio Rojo, il y a une espèce d’osmose entre celles et ceux que tu filmes et leur environnement.
G.Q : C’était très important de filmer les personnages dans leur quotidien, dans leurs espaces de vie de façon très naturelle et intime. Ça demandait dans un premier temps de passer du temps avec eux, de les rencontrer avant d’amener la caméra dans un second temps. C’est un travail de longue haleine pour réussir à obtenir du naturel dans ces gestes filmés.
M.M : Et ton prochain film suivra-t-il une forme de continuité ?
G.Q : Oui, on peut dire qu’un film m’a emmené à l’autre dans une sorte de spirale. Je vois ces trois films comme une trilogie de la forêt qui parlerait de façon différente de sa disparition. Dans ce nouveau projet, je pars à la recherche d’un vieillard qui habitait la région depuis des décennies et qui est parti en pirogue en aval du fleuve. En discutant avec les gens, j’ai appris qu’il s’agissait du dernier membre des Tinigua et le dernier détenteur de la langue de cette ethnie. Je voudrais faire parler les habitants et les paysans qui l’ont croisé ou connu pour en faire un portrait contradictoire, fantastique, banal et réel. J’imagine ce film comme un portrait partial et subjectif de la vie de cet homme et de son ethnie.
Retrouvez Guillermo et son film Rio Rojo en tournée costarmoricaine cette semaine à Saint Quay Portrieux, Loudéac et Trédrez-Locquémeau