À l’occasion de la diffusion de son film Mascarades au lycée agricole de Pommerit-Jaudy, la réalisatrice a pu échanger avec les élèves autour des pratiques agricoles d’un village bolivien qu’elle connaît bien pour l’avoir filmé sur le temps long. Avant de reprendre sa tournée, elle s’est prêtée aux questions de notre stagiaire.
Ja Panvert : “Qu’es-tu allée chercher dans ton film ?”
Claire Second : “Au début, je pensais faire un documentaire sur la culture du quinoa, pour raconter la beauté de cette plante et la singularité de cette communauté de Tomave. Plus précisément, leur manière de cultiver sur les hauts plateaux, je trouve leur rapport à la Terre Mère très beau. C’est assez fascinant de vivre dans un lieux aussi isolé, aussi extrême climatiquement, au milieu d’un désert et que cette plante fasse un pont entre eux qui la produisent et nous qui la consommons.
Après, au fur et à mesure que je passais du temps là-bas, il y a eu des amitiés fortes qui se sont nouées. Je me suis rendue compte de tout ce qu’il se passait entre les paysans et les ingénieurs agronomes. Leurs nombreuses visites et leur insistance m’ont beaucoup intéressée car ça mettait en avant leur propre conception de la terre et de l’agriculture. Et puis la manière des paysans de les recevoir et de leur résister m’a fascinée. J’ai voulu raconter la vie de ce village en essayant de construire un contraste entre l’aspect festif lié au cycle agricole que j’apprécie particulièrement et les moments de réunion où d’un coup, l’intensité baisse et on se retrouve assis, à écouter des cours techniques. Montrer à la fois la joie, l’omniprésence du rire, du déguisement et la réalité de la vie de ce village de Tomave.”
J.P : “Vous, quel est votre lien avec ce sujet ?”
C.S : “La Bolivie est un pays que je connais grâce à des ami.e.s qui y vivent. Depuis 2013, je vais au village de Tomave car, dans le cadre de ma licence de biologie, je m’intéresse au quinoa. J’avais trouvé la plante très belle donc j’ai eu l’envie de voir ça de plus près et j’avais la curiosité de connaître les communautés de l’Altiplano, étant donné que jusque-là je ne connaissais que les grosses villes boliviennes.
En y allant, je me suis intégrée très vite là-bas ; selon moi c’est parce que je partage avec eux un intérêt très fort pour l’agriculture, travaillant moi aussi dans ce domaine en France. Ça m’a beaucoup plu de partager le travail avec eux, m’occuper des lamas et du quinoa à leurs côtés. Ça a créé beaucoup d’échanges et ça m’a permis de rester en tout 1 an et demi au village. C’était extrêmement riche, j’ai vu des naissances et des décès et on continue même de s’appeler avec des ami.e.s de là-bas.”
J.P : “Avez-vous fait d’autres films avant ?”
C.S : “Mascarades est mon premier film professionnel. Avant ça j’avais fait un film de fin d’études au Master à Lussas. C’était un court-métrage qui parlait du Lichen dans les montagnes ardéchoises, un autre végétal que j’aime bien. En 2013, j’avais fait un film d’une heure à Tomave lors de mon premier séjour là-bas mais c’était dans le cadre de mes études aussi. C’était simplement une espèce d’essai et une manière de tester l’accueil de la caméra par ceux que je filmais.
Faire ce film m’a permis de créer du lien. J’avais des appréhensions mais à partir du moment où j’étais derrière la caméra, on m’a proposé de participer à certaines cérémonies, certains événements. Même si quand on filme, on est frustré de ne pas pouvoir participer pleinement, la caméra et l’idée du film ont vraiment permis de voir plus de choses que s’il n’y en avait pas.”
La réalisatrice continue d’accompagner son film dans toute la Bretagne et cette semaine à St-Cast-le-Guildo le 9, Lanvallay le 11, Paimpol le 12 et Binic-Étables-sur-Mer le 17 nov.